Crise politique au Mali : L’UA et la Cedeao suspendent le pays de leurs instances

Un nouveau coup dur pour le pays, qui a déjà subi des sanctions de plusieurs organisations africaines et pays étrangers du fait d’une répétions  de coup d’État qui ont déjà vu renverser deux gouvernements.

 

A5 NEWS – L’Union africaine (UA) a annoncé mardi 1er juin dans un communiqué sa décision de suspendre le Mali, théâtre en mai d’un second coup d’Etat militaire en neuf mois. « L’UA “décide (…) de suspendre immédiatement la République du Mali de sa participation à toutes les activités de l’Union africaine, ses organes et ses institutions, jusqu’à ce qu’un ordre constitutionnel normal soit rétabli dans le pays », déclare dans ce texte le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l’organisation. Une décision qui intervient quelques jours seulement après celle de la Cédéao (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), qui a également annoncé suspendre ce pays des ses institutions.

colonel Assimi Goïta
Le colonel Assimi Goïta

« L’UA appelle les militaires maliens à urgemment et inconditionnellement retourner dans leurs casernes et à s’abstenir de toute interférence future dans le processus politique au MaliL’UA demande également à établir les conditions pour le retour à une transition démocratique « sans entrave, transparente et rapide. Sans quoi, le Conseil n’hésitera pas à imposer des sanctions ciblées et d’autres mesures punitives » contre ceux qui empêchent la transition, ajoute le texte du Conseil de Paix et Sécurité.

La Cedeao ainsi que plusieurs pays se prononcent

L’appartenance du Mali à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a été suspendue en réaction au nouveau coup de force des militaires maliens. Une dizaine de chefs d’État des pays membres de l’institution sous-régionale commune, rassemblés à Accra le 30 mai dernier, a condamné le coup d’État tout en se gardant de prendre d’autres sanctions. Ils ont en revanche réclamé la nomination « immédiate » d’un « nouveau » Premier ministre issu de la société civile et la formation d’un gouvernement « inclusif », selon le communiqué final du sommet.

A lire aussi

Réuni en session extraordinaire à Paris, le Conseil de Permanent de la Francophonie, une des instances de l’Organisation internationale de la Francophonie, a “condamné fermement” le coup de force du colonel Assimi Goïta le 24 mai dernier et a décidé de “suspendre la République du Mali des instances de la francophonie”, tout en maintenant les programmes de rétablissement de l’ordre démocratique. La communauté internationale, préoccupée par la situation sécuritaire et la lutte contre le jihadisme dans la région, a acté le fait accompli, sans prendre de sanctions.

Les États-Unis d’Amérique ont annoncé, mercredi, la suspension de leur aide aux Forces de sécurité et de défense maliennes. La France, partenaire clé dans la lutte antiterroriste avec sa force Barkhane (5.100 hommes) s’est alignées sur la Cédéao. Le 26 mai, le Conseil de sécurité de l’ONU avait émis une condamnation “ferme” mais sans prendre de sanctions.

Deux coups d’Etat en neuf mois 

Ce pays du Sahel a connu deux coups d’Etat en neuf mois. Le 18 août 2020, le président Ibrahim Boubacar Keïta, dit “IBK”, accusé de corruption et d’impuissance face à l’insécurité, est renversé par un putsch après plusieurs mois de manifestations antigouvernementales.
L’UA suspend alors le Mali. Mais l’organisation continentale lève cette décision début octobre, après que la junte s’est  engagée à une transition vers un pouvoir civil dans les 18 mois. Le 15 avril 2021, les autorités de transition fixent dans ce sens des dates en février et mars 2022 pour les élections présidentielles et législatives.

A lire aussi

Mais en mai, les militaires, mécontents d’une recomposition du gouvernement décidée suite à une contestation grandissante, arrêtent le président et le Premier ministre, Bah Ndaw et Moctar Ouane, conduits sous la contrainte au camp militaire de Kati, près de Bamako.
La Cour constitutionnelle déclare ensuite chef de l’Etat et président de transition le colonel Assimi Goïta, homme clé dans l’actuelle crise politique. Ce dernier a assuré que les élections prévues se tiendront courant 2022.

Une situation de plus en plus compliquée

La situation actuelle au Mali est très complexe. Assimi Goïta et un groupe de colonels avaient alors renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta après des mois de contestation populaire, mais, sous la pression internationale, avaient accepté la nomination d’un président et d’un Premier ministre civils. La junte avait cependant taillé pour Assimi Goïta une vice-présidence sur mesure, investie des charges primordiales de la sécurité. Les colonels avaient nommé les leurs aux postes clés. Lundi, l’ancien commandant de bataillon des forces spéciales a fait arrêter le président Bah N’Daw et le Premier ministre Moctar Ouane, cautions civiles de la transition, qui ont ensuite démissionné, selon la version officielle.

Dans son discours d’ouverture, le président en exercice de la Cedeao, le Ghanéen Nana Akufo-Addo, avait expliqué avoir convoqué ce sommet extraordinaire « devant la gravité des faits ». Avec la nomination du colonel Goïta, la Cour constitutionnelle malienne a officialisé un fait accompli auquel les partenaires du Mali avaient essayé de s’opposer après le coup d’État d’août 2020. L’engagement pris pour une transition civile était ainsi foulé aux pieds, suscitant le doute sur les autres promesses, à commencer par la tenue d’élections début 2022. La junte a dit qu’elle comptait respecter le calendrier, mais a ajouté qu’il pouvait être soumis à des aléas.

La réaction de l’UA sur la situation au Mali était particulièrement attendue. Après le coup d’État de 2020, la Cedeao avait une première fois suspendu le Mali de tous ses organes de décision, fermé les frontières de ses États membres et stoppé les échanges financiers et commerciaux avec le pays, à l’exception des produits de première nécessité. Elle avait levé les sanctions quand la junte avait paru se plier à ses exigences.

 

Facebook Comments Box